Le petit chaperon rouge
 
  

Il était une fois une petite fille que tout le monde aimait bien, surtout sa grand-mère. Elle ne savait qu'entreprendre pour lui faire plaisir. Un jour, elle lui offrit un petit bonnet de velours rouge, qui lui allait si bien qu'elle ne voulut plus en porter d'autre. Du coup, on l'appela « Chaperon rouge ».
Un jour, sa mère lui dit :
- Viens voir, Chaperon rouge : voici un morceau de gâteau et une bouteille de vin. Porte-les à ta grand-mère ; elle est malade et faible ; elle s'en délectera ; fais vite, avant qu'il ne fasse trop chaud. Et quand tu seras en chemin, sois bien sage et ne t'écarte pas de ta route, sinon tu casserais la bouteille et ta grand-mère n'aurait plus rien. Et quand tu arriveras chez elle, n'oublie pas de dire « Bonjour » et ne va pas fureter dans tous les coins.
- Je ferai tout comme il faut, dit le Petit Chaperon rouge à sa mère.
La fillette lui dit au revoir. La grand-mère habitait loin, au milieu de la forêt, à une demi-heure du village. Lorsque le Petit Chaperon rouge arriva dans le bois, il rencontra le Loup. Mais il ne savait pas que c'était une vilaine bête et ne le craignait point.
- Bonjour, Chaperon rouge, dit le Loup.
- Bonjour, Loup, dit le Chaperon rouge.
- Où donc vas-tu si tôt, Chaperon rouge ?
- Chez ma grand-mère.
- Que portes-tu dans ton panier ?
- Du gâteau et du vin. Hier nous avons fait de la pâtisserie, et ça fera du bien à ma grand-mère. Ça la fortifiera.
- Où habite donc ta grand-mère, Chaperon rouge ?
- Oh ! à un bon quart d'heure d'ici, dans la forêt. Sa maison se trouve sous les trois gros chênes. En dessous, il y a une haie de noisetiers, tu sais bien ? dit le petit Chaperon rouge.
Le Loup se dit : « Voilà un mets bien jeune et bien tendre, un vrai régal ! Il sera encore bien meilleur que la vieille. Il faut que je m'y prenne adroitement pour les attraper toutes les eux ! »
Il l'accompagna un bout de chemin et dit :
- Chaperon rouge, vois ces belles fleurs autour de nous. Pourquoi ne les regardes-tu pas ? J'ai l'impression que tu n'écoutes même pas comme les oiseaux chantent joliment. Tu marches comme si tu allais à l'école, alors que tout est si beau, ici, dans la forêt !
Le Petit Chaperon rouge ouvrit les yeux et lorsqu'elle vit comment les rayons du soleil dansaient de-ci, de-là à travers les arbres, et combien tout était plein de fleurs, elle pensa :« Si j'apportais à ma grand- mère un beau bouquet de fleurs, ça lui ferait bien plaisir. Il est encore si tôt que j'arriverai bien à l'heure. »
Elle quitta le chemin, pénétra dans le bois et cueillit des fleurs. Et, chaque fois qu'elle en avait cueilli une, elle se disait : « Plus loin, j'en vois une plus belle » ; et elle y allait et s'enfonçait toujours plus profondément dans la forêt. Le Loup lui, courait tout droit vers la maison de la grand-mère. Il frappa à la porte.
- Qui est là ?
- C'est le Petit Chaperon rouge qui t'apporte du gâteau et du vin.
- Tire la chevillette, dit la grand-mère. Je suis trop faible et ne peux me lever.
Le Loup tire la chevillette, la porte s'ouvre et sans dire un mot, il s'approche du lit de la grand-mère et l'avale. Il enfile ses habits, met sa coiffe, se couche dans son lit et tire les rideaux.
Pendant ce temps, le petit Chaperon Rouge avait fait la chasse aux fleurs. Lorsque la fillette en eut tant qu'elle pouvait à peine les porter, elle se souvint soudain de sa grand-mère et reprit la route pour se rendre auprès d'elle. Elle fut très étonnée de voir la porte ouverte. Et lorsqu'elle entra dans la chambre, cela lui sembla si curieux qu'elle se dit : « Mon dieu, comme je suis craintive aujourd'hui. Et, cependant, d'habitude, je suis si contente d'être auprès de ma grand-mère ! » Elle s'écria :
- Bonjour !
Mais nulle réponse. Elle s'approcha du lit et tira les rideaux. La grand-mère y était couchée, sa coiffe tirée très bas sur son visage. Elle avait l'air bizarre.
- Oh, grand-mère, comme tu as de grandes oreilles.
- C'est pour mieux t'entendre...
- Oh ! grand-mère, comme tu as de grands yeux !
- C'est pour mieux te voir !
- Oh ! grand-mère, comme tu as de grandes mains !
- C'est pour mieux t'étreindre...
- Mais, grand-mère, comme tu as une horrible et grande bouche !
- C'est pour mieux te manger !
À peine le Loup eut-il prononcé ces mots, qu'il bondit hors du lit et avala le pauvre Petit Chaperon rouge.
Lorsque le Loup eut apaisé sa faim, il se recoucha, s'endormit et commença à ronfler bruyamment. Un chasseur passait justement devant la maison. Il se dit : « Comme cette vieille femme ronfle ! Il faut que je voie si elle a besoin de quelque chose. » Il entre dans la chambre et quand il arrive devant le lit, il voit que c'est un Loup qui y est couché.
- Ah ! c'est toi, bandit ! dit-il. Voilà bien longtemps que je te cherche...
Il se prépare à faire feu lorsque tout à coup l'idée lui vient que le Loup pourrait bien avoir avalé la grand-mère et qu'il serait peut-être encore possible de la sauver. Il ne tire pas, mais prend des ciseaux et commence à ouvrir le ventre du Loup endormi. À peine avait-il donné quelques coups de ciseaux qu'il aperçoit le Chaperon rouge. Quelques coups encore et la voilà qui sort du Loup et dit :
- Ah ! comme j'ai eu peur ! Comme il faisait sombre dans le ventre du Loup !
Et voilà que la grand-mère sort à son tour, pouvant à peine respirer. Le Petit Chaperon rouge se hâte de chercher de grosses pierres. Ils en remplissent le ventre du Loup. Lorsque celui-ci se réveilla, il voulut s'enfuir. Mais les pierres étaient si lourdes qu'il s'écrasa par terre et mourut.
Ils étaient bien contents tous les trois : le chasseur dépouilla le Loup et l'emporta chez lui. La grand-mère mangea le gâteau et but le vin que le Petit Chaperon rouge avait apportés. Elle s'en trouva toute ragaillardie. Le Petit Chaperon rouge cependant pensait : « Je ne quitterai plus jamais mon chemin pour aller me promener dans la forêt, quand ma maman me l'aura interdit. »
 

 
 

Retour Liste
 
 

 
 
 
Le petit pou et la petite puce
 
  

Le petit pou et la petite puce vivaient ensemble, tenaient ensemble leur petite maison et brassaient leur bière dans une coquille d'oeuf.
Un jour le petit pou tomba dans la bière et s'ébouillanta. La petite puce se mit à pleurer à chaudes larmes. La petite porte de la salle s'étonna :
- Pourquoi pleures-tu ainsi, petite puce ?
- Parce que le pou s'est ébouillanté.
La petite porte se mit à grincer et le petit balai dans le coin demanda :
- Pourquoi grinces-tu ainsi, petite porte ?
- Comment pourrais-je ne pas grincer !
Le petit pou s'est ébouillanté, la petite puce en perd la santé.
Le petit balai se mit à s'agiter de tous côtés. Une petite charrette qui passait par là, cria :
- Pourquoi t'agites-tu ainsi, petit balai ?
- Comment pourrais-je rester en place !
Le petit pou s'est ébouillanté , la petite puce en perd la santé,
et la petite porte grince à qui mieux mieux.
Et la petite charrette dit :
- Moi, je vais rouler. Et elle se mit à rouler à toute vitesse. Elle passa par le dépotoir et les balayures lui demandèrent :
- Pourquoi fonces-tu ainsi, petite charrette ?
- Comment pourrais-je ne pas foncer !
Le petit pou s'est ébouillanté , la petite puce en perd la santé,
la petite porte grince à qui mieux mieux, le balai s'agite, sauve-qui-peut!
Les balayures décidèrent alors :
- Nous allons brûler de toutes nos forces. Et elles s'enflammèrent aussitôt. Le petit arbre à côté du dépotoir demanda :
- Allons, balayures, pourquoi brûlez-vous ainsi ?
- Comment pourrions-nous ne pas brûler !
Le petit pou s'est ébouillanté , la petite puce en perd la santé,
la petite porte grince à qui mieux mieux, le balai s'agite, sauve-qui-peut !
La charrctte fonce fendant les airs.
Et le petit arbre dit :
- Alors moi, je vais trembler.
Et il se mit à trembler à en perdre toutes ses feuilles. Une petite fille, qui passait par là avec une cruche d'eau à la main, s'étonna :
- Pourquoi trembles-tu ainsi, petit arbre ?
- Comment pourrais-je ne pas trembler !
Le petit pou s'est ébouillanté , la petite puce en perd la santé,
la petite porte grince à qui mieux mieux, le balai s'agite, sauve-qui-peut !
la chairette fonce fendant les airs, les balayures brùlent en un feu d'enfer.
Et la petite fille dit :
- Alors moi, je vais casser ma cruche. Et elle la cassa.
La petite source d'où jaillissait l'eau, demanda :
- Pourquoi casses-tu ta cruche, petite fille ?
- Comment pourrais-je ne pas la casser !
Le petit pou s'est ébouillanté, la petite puce en perd la santé,
la porte grince à qui mieux mieux, le balai s'agite, sauve-qui-peut !
la charrette fonce fendant les airs, les balayures brûlent en un feu d'enfer.
Et le petit arbre, le pauvre, du pied à la tête il tremble.
- Ah bon, dit la petite source, alors moi, Je vais déborder.
Et elle se mit à déborder ; et l'eau inonda tout en noyant la petite fille, le petit arbre, les balayures, la charrette, le petit balai, la petite porte, la petite puce et le petit pou, tous autant qu'ils étaient.
 

 
 

Retour Liste
 
 

 
 
 
Le poêle en fonte
 
  

Au temps où l'on pratiquait encore la magie, une vieille sorcière ensorcela un prince royal et l'obligea à vivre dans un immense poêle en fonte situé en pleine forêt. Le prince y resta de nombreuses années car personne ne savait le délivrer. Un jour, une princesse s'égara dans la forêt et ne savait pas comment retourner chez elle. Elle erra pendant neuf jours entre les arbres touffus et arriva finalement au poêle en fonte. Elle entendit alors une voix lui demander :
- D'où viens-tu ? Où veux-tu aller ?
- Je me suis égarée et je ne sais pas comment rentrer chez moi.
Et la voix du poêle dit :
- Je t'aiderai et tu pourras vite rentrer chez toi, si tu me promets de faire ce que je te demanderai. Moi aussi je suis un prince et encore plus noble que toi, et je voudrais t'épouser.
La fille royale s'affola.
- Mon Dieu, que ferais-je avec un poêle en fonte ? pensa-t-elle, mais souhaitant par-dessus tout rentrer vite chez elle, elle promit au poêle de faire tout ce qu'il lui demanderait.
Et la voix dit :
- Tu reviendras ici avec un couteau et tu creuseras un trou dans la fonte.
Et un guide apparut et la reconduisit chez elle, sans prononcer un mot.
Au château, tout le monde se réjouit du retour de la princesse. Le vieux roi se jeta à son cou et l'embrassa avec effusion. Sa fille fut néanmoins très troublée et elle dit d'une voix triste :
- Oh, mon cher père, si tu savais ce que j'ai dû endurer ! Je n'aurais jamais réussi à sortir de cette forêt profonde et épaisse si je n'étais pas arrivée à un poêle en fonte qui m'a aidée. En revanche, j'ai dû m'engager à revenir auprès de lui pour le libérer et l'épouser.
Le vieux roi faillit s'évanouir. Il fut effondré d'autant plus qu'il s'agissait de sa fille unique. Finalement, ils décidèrent d'envoyer dans la forêt la fille du meunier à la place de la princesse. Ils l'accompagnèrent jusqu'à la lisière de la forêt, lui donnèrent un couteau et lui demandèrent de creuser un trou dans le poêle.
Elle creusa sans relâche pendant vingt-quatre heures mais sans aucun effet. À l'aube on entendit depuis le poêle en fonte :
- Il me semble que le jour s'est levé.
- J'ai la même l'impression, répondit la jeune fille. Je crois entendre tourner le moulin de mon père.
- Ah, tu es donc la fille du meunier ! Tâche de rentrer d'où tu es venue et envoie-moi la princesse !
La jeune fille partit et dit au roi que ce n'était pas elle qu'on voulait dans la forêt, que c'était la princesse qu'on y attendait.
Le vieux roi eut peur et la princesse commença à pleurer. Mais il y avait encore une autre jeune fille au château, la fille du porcher, et elle était encore plus belle que la fille du meunier. Ils décidèrent donc de lui donner un peu d'argent pour qu'elle aille dans la forêt à la place de la princesse. Ils l'accompagnèrent jusqu'à la forêt puis, pendant vingt-quatre heures, elle creusa la fonte sans relâche. Mais elle ne réussit à gratter le moindre fragment.
À l'aube, elle entendit la voix du poêle :
- Il me semble que le jour s'est levé.
Et la jeune fille répondit :
- Il me semble aussi, j'ai l'impression d'entendre le cor de mon père.
- Ah, tu es donc la fille du porcher ! Va-t'en tout de suite et envoie-moi la princesse ! Et dis-lui que si elle ne vient pas, tout se passera comme je l'ai promis. Le royaume tout entier sera détruit, et il ne restera pas une seule pierre debout.
La princesse écouta les larmes aux yeux, mais il ne servait à rien de se lamenter.
Elle fit donc ses adieux à son père, prit un couteau et se dirigea vers le poêle en fonte au fond de la forêt. Une fois sur place, elle se mit à gratter et la fonte semblait fondre d'elle-même sous ses mains. Et deux petites heures plus tard, elle avait déjà réussi à creuser un petit trou. Elle regarda alors dans le poêle et y vit un beau jeune homme vêtu d'un costume brillant, brodé d'or et serti de pierres précieuses. Il lui plaisait vraiment et son coeur s'enflamma pour lui. Elle continua à creuser jusqu'à ce que le trou soit suffisamment large pour que le prince puisse sortir. Il dit alors :
- Tu m'appartiens et je t'appartiens. Tu es ma fiancée, car tu m'as sauvé.
Et il voulut l'emmener dans son royaume sur-le-champ, mais la princesse souhaita revoir son vieux père. Le prince ne s'y opposa pas, mais lui demanda de ne pas dire plus de trois mots à son père et de le rejoindre ensuite sans tarder.
La princesse rentra chez elle - mais elle prononça plus de trois mots. Et le poêle en fonte disparut, s'envola loin par-dessus les monts en verre et les épées tranchantes, mais le prince n'était plus à l'intérieur il était libéré.
La princesse fit ses adieux à son père, prit un peu d'argent pour la route et alla retrouver le prince dans la forêt. Mais elle ne le trouva pas. Elle le chercha pendant neuf jours, et elle était épuisée et affamée, car elle ne savait pas comment se nourrir. À la tombée de la nuit, ayant peur des animaux sauvages, elle grimpa sur un petit arbre pour y passer la nuit. Et vers minuit, elle aperçut une faible lumière au loin.
« J'y trouverai peut-être de l'aide » se dit-elle.
Elle descendit de l'arbre et partit en direction de la lumière.
Elle arriva à une petite chaumière, vieille et voûtée, toute recouverte d'herbes.
« Ah, où suis-je arrivée, pauvre de moi ? » soupira la princesse. Elle jeta un coup d'oeil à l'intérieur, mais elle ne vit que des grenouilles, petites et grosses. Puis, elle aperçut aussi une belle table garnie, avec du vin et de la viande rôtie, et des assiettes et des coupes en argent. Elle prit donc son courage à deux mains et frappa à la porte. Et la grenouille Grassouillette coassa en réponse :
Dépêche-toi, grenouille verte,
Tellement grosse mais si alerte,
Hop et hop ! Va-t'en découvrir
Qui, notre maison, va accueillir.
Alors, une grenouille arriva en sautant et ouvrit la porte. Et lorsque la visiteuse la franchit, toutes les grenouilles l'accueillirent très aimablement.
- Que faites-vous ici ? demandèrent-elles. D'où venez-vous et où allez-vous ?
La princesse leur raconta ce que lui était arrivé ; qu'elle n'avait pas tenu sa promesse et avait prononcé plus de trois mots en parlant avec son père et que le poêle en fonte avec le prince avaient disparu. Elle leur dit aussi qu'elle était décidée à chercher le prince par monts et par vaux, jusqu'à ce qu'elle le retrouve. Et la vieille grenouille Grassouillette dit :
Dépêche-toi, grenouille verte,
Tellement grosse mais si alerte,
Hop et hop ! Va vite chercher,
La grande boîte, bien cachée.
Apporte-la-moi à toute vitesse,
Ne fais pas languir la princesse !
La Grenouillette s'en alla en sautillant et rapporta une grande boite. Puis les grenouilles donnèrent à la princesse à manger et à boire et la conduisirent jusqu'à un lit somptueux, qui semblait être fait de soie et de velours. La princesse se coucha, se recommanda à Dieu et s'endormit.
Au matin, elle se leva de très bonne heure. La vieille grenouille lui donna trois aiguilles prises dans la grande boîte et souligna que sans elles, elle n'irait pas loin, puisqu'elle devait franchir une grande montagne en verre, trois épées tranchantes et un très grand lac. Si elle y parvenait, elle retrouverait son bien-aimé. Et elle lui recommanda de prendre bien soin des aiguilles et des deux autres objets qu'elle allait lui donner ; une roue de charrue et trois noix.
Et la princesse partit avec tous les objets offerts par les grenouilles. Lorsqu'elle arriva à la montagne en verre, lisse comme un miroir, elle se mit à enfoncer les aiguilles, à chaque pas, derrière elle et ensuite devant elle, avançant en procédant ainsi jusqu'à ce qu'elle fût passée de l'autre côté. Puis elle choisit un endroit pour cacher ses aiguilles et tâcha de bien se le rappeler. Peu après, elle arriva aux trois épées tranchantes et monta alors sur la roue de la charrue pour les franchir. Finalement, elle atteignit un grand lac. Elle le franchit en nageant et arriva enfin devant un château magnifique. Elle entra et demanda du travail en disant qu'elle était très pauvre et qu'elle avait besoin de travailler pour survivre. Elle savait bien, en fait, que le prince qu'elle avait libéré du poêle en fonte dans la forêt profonde vivait dans ce château. Ils l'engagèrent comme aide-cuisinière, pour un salaire insignifiant.
Le jeune prince avait entre-temps choisi une autre fiancée et avait l'intention de l'épouser, parce qu'il était persuadé que la princesse qui l'avait libéré était déjà morte depuis longtemps.
Le soir, la princesse lava la vaisselle et, ayant terminé son travail à la cuisine, elle plongea la main dans sa poche pour en retirer les trois noix reçues de la vieille grenouille. Elle cassa la première pour pouvoir manger le cerneau, mais qu'elle ne fut pas sa surprise lorsqu'elle vit, à la place du fruit, une magnifique robe de princesse. Lorsque la fiancée du prince l'apprit, elle vint voir l'aide-cuisinière et voulut la lui acheter coûte que coûte. De toute manière, une telle robe, disait-elle, n'était pas faite pour une domestique. La servante répondit que non, qu'elle ne voulait pas la vendre, sauf si la fiancée la laissait passer une nuit dans la chambre du prince. Dans ce cas, elle pourrait l'avoir tout de suite. La fiancée accepta, car la robe était magnifique et elle n'en avait pas d'aussi belle. Le soir, elle dit à son fiancé :
- Cette petite folle de la cuisine veut absolument dormir cette nuit dans ta chambre à coucher.
- Si toi, cela ne te gêne pas, je n'ai rien contre, répondit-il.
Mais la fiancée lui fit boire un verre de vin dans lequel elle avait mis un somnifère. L'aide-cuisinière se rendit à la chambre du prince, mais celui-ci dormait d'un sommeil si profond qu'elle ne réussit pas à le réveiller. Elle passa la nuit à pleurer et à se lamenter :
- Je t'ai délivré de la forêt sauvage et du poêle en fonte. Je t'ai longtemps cherché et, pour te retrouver, j'ai escaladé une montagne en verre, franchi trois épées tranchantes et traversé un lac immense - et maintenant que je suis là, tu ne m'entends même pas !
Les valets placés derrière la porte de la chambre entendirent pendant toute la nuit les pleurs et les lamentations de la jeune fille et, le lendemain, ils le dirent à leur maître.
Le soir, après avoir lavé le sol de la cuisine, la princesse ouvrit la deuxième noix. La robe qui se trouvait à l'intérieur était encore plus belle que la précédente. Dès que la fiancée du prince la vit, elle voulut l'acheter à tout prix. Mais l'aide-cuisinière refusa l'argent et demanda à nouveau de pouvoir passer la nuit dans la chambre du prince. Or, la fiancée versa à nouveau un somnifère dans le verre de son futur époux et le prince dormit et ne put donc rien entendre. La jeune fille pleura toute la nuit en se lamentant :
- Je t'ai délivré de la forêt sauvage et du poêle en fonte. Je t'ai cherché et pour te retrouver j'ai escaladé une montagne en verre, franchi trois épées tranchantes et traversé à la nage un lac immense - et maintenant que je suis là, tu ne le sais même pas !
Le lendemain, les laquais qui, derrière la porte, entendirent à nouveau les pleurs de la jeune fille, allèrent raconter tout à leur maître.
Lorsque, le troisième soir, la princesse, après avoir lavé la vaisselle, cassa la dernière noix, une robe en or pur et encore plus ravissante que les précédentes, brillait à l'intérieur. Dès qu'elle la vit, la fiancée voulut l'acquérir à tout prix. Mais la jeune fille refusa à nouveau et demanda pour la troisième fois de pouvoir passer la nuit dans la chambre à coucher du prince. Cette fois-ci le prince fit attention et déversa en cachette la boisson avec le somnifère. Et lorsque la princesse en larmes se mit à appeler : « Mon bien-aimé, je t'ai sauvé de la forêt profonde et du poêle en fonte ... » Le prince sauta de son lit et s'écria :
- C'est toi ma vraie fiancée, tu m'appartiens et je t'appartiens.
Et alors, la nuit même, ils partirent dans un carrosse. Lorsqu'ils arrivèrent au lac immense, ils le traversèrent en barque, puis ils franchirent les épées tranchantes en montant sur la roue de la charrue et pour passer de l'autre côté de la montagne en verre ils s'aidèrent des trois aiguilles bien cachées.
Finalement, ils arrivèrent à la vieille petite chaumière et lorsqu'ils pénétrèrent à l'intérieur, elle se transforma en un château somptueux. Les grenouilles se transformèrent en princes et en princesses et tous ensemble ils se réjouirent lorsque le prince épousa la princesse. Ils s'installèrent au château, qui était bien plus grand que celui où était née la princesse, et comme le vieux roi s'ennuyait seul, ils partirent le chercher et l'emmenèrent avec eux. Ainsi les deux jeunes époux régnèrent ensemble sur les deux royaumes et vécurent heureux jusqu'à la fin de leurs jours.
 

 
 

Retour Liste
 
 

 
 
 
Le renard et les oies
 
  

Un jour qu'il rôdait selon sa coutume, maître renard arriva dans une prairie où une troupe de belles oies bien grasses se prélassaient au soleil. A cette vue, notre chercheur d'aventures s'écria :
- En vérité, je ne pouvais venir plus à propos ! vous voilà alignées d'une façon si commode, que je n'aurai guère besoin de me déranger pour vous croquer.
A ces mots, les oies épouvantées poussèrent des cris lamentables et supplièrent le renard de vouloir bien se laisser toucher, et de ne point leur ôter la vie.
Elles eurent beau dire et beau faire, maître renard resta inébranlable :
- Il n'y a pas de grâce possible, répondit-il, votre dernière heure a sonné.
Alors, l'une des oies prit la parole au nom de la troupe :
- Puisqu'il nous faut, dit-elle, renoncer aux douces voluptés des prés et des eaux, soyez assez généreux pour nous accorder une dernière faveur : promettez de ne nous ôter la vie que lorsque nous aurons achevé notre prière.
- J'y consens, répondit le renard ; commencez donc votre prière ; j'attendrai qu'elle soit finie.
Aussitôt, une des oies entonna une interminable prière, un peu monotone à la vérité, car elle ne cessait de dire : "caa-caa-caa". Et comme, dans son zèle, la pauvre bête ne s'interrompait jamais, la seconde oie entonna le même refrain, puis la troisième, puis la quatrième, puis enfin toute la troupe, de sorte qu'il n'y eut bientôt plus qu'un concert de caa-caa-caa ! Et maître renard, qui avait donné sa parole, dut attendre qu'elles eussent fini leur caquetage.
Nous devons faire comme lui pour connaître la suite de ce conte.
 

 
 

Retour Liste