MA FRANCE
 
De plaines en forêts de vallons en collines
Du printemps qui va naître à tes mortes saisons
De ce que j´ai vécu à ce que j´imagine
Je n´en finirais pas d´écrire ta chanson
Ma France
*
Au grand soleil d´été qui courbe la Provence
Des genêts de Bretagne aux bruyères d´Ardèche
Quelque chose dans l´air a cette transparence
Et ce goût du bonheur qui rend ma lèvre sèche
Ma France
*
Cet air de liberté au-delà des frontières
Aux peuples étrangers qui donnaient le vertige
Et dont vous usurpez aujourd´hui le prestige
Elle répond toujours du nom de Robespierre
Ma France
*
Celle du vieil Hugo tonnant de son exil
Des enfants de cinq ans travaillant dans les mines
Celle qui construisit de ses mains vos usines
Celle dont monsieur Thiers a dit qu´on la fusille
Ma France
*
Picasso tient le monde au bout de sa palette
Des lèvres d´Éluard s´envolent des colombes
Ils n´en finissent pas tes artistes prophètes
De dire qu´il est temps que le malheur succombe
Ma France
*
Leurs voix se multiplient à n´en plus faire qu´une
Celle qui paie toujours vos crimes vos erreurs
En remplissant l´histoire et ses fosses communes
Que je chante à jamais celle des travailleurs
Ma France
*
Celle qui ne possède en or que ses nuits blanches
Pour la lutte obstinée de ce temps quotidien
Du journal que l´on vend le matin d´un dimanche
A l´affiche qu´on colle au mur du lendemain
Ma France
*
Qu´elle monte des mines descende des collines
Celle qui chante en moi la belle la rebelle
Elle tient l´avenir, serré dans ses mains fines
Celle de trente-six à soixante-huit chandelles
Ma France
*


 
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QUAND LES HOMMES VIVRONT D'AMOUR
 
Quand les hommes vivront d’amour
Il n’y aura plus de misère
Et commenceront les beaux jours
Mais nous, nous serons morts mon frère
***
Quand les hommes vivront d’amour
Ce sera la paix sur la terre
Les soldats seront troubadours
Mais nous, nous serons morts mon frère
***
Dans la grande chaîne de la vie
Où il fallait que nous passions
Où il fallait que nous soyions
Nous aurons eu la mauvaise partie
***
Quand les hommes vivront d’amour
Il n’y aura plus de misère
Et commenceront les beaux jours
Mais nous, nous serons morts mon frère
***
Mais quand les hommes vivront d’amour
Qu’il n’y aura plus de misère
Peut-être songeront-ils un jour
À nous qui serons morts, mon frère
***
Nous qui aurons aux mauvais jours
Dans la haine et puis dans la guerre
Cherché la paix, cherché l’amour
Qu’ils connaîtront alors mon frère
***
Dans la grande chaîne de la vie
Pour qu’il y ait un meilleur temps
Il faut toujours quelques perdants
De la sagesse ici-bas c’est le prix
***
Quand les hommes vivront d’amour
Il n’y aura plus de misère
Et commenceront les beaux jours
Mais nous, nous serons morts mon frère


 
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AU PRINTEMPS de QUOI REVAIS-TU ?
 
Au printemps de quoi rêvais-tu ?
Vieux monde clos comme une orange
Faites que quelque chose change
Et l'on croisait des inconnus
Riant aux anges
Au printemps de quoi rêvais-tu ?
*
Au printemps de quoi riais-tu ?
Jeune homme bleu de l'innocence
Tout a couleur de l'espérance
Que l'on se batte dans la rue
Ou qu'on y danse
Au printemps de quoi riais-tu ?
*
Au printemps de quoi rêvais-tu ?
Poing levé des vieilles batailles
Et qui sait pour quelles semailles
Quand la grève épousant la rue
Bat la muraille
Au printemps de quoi rêvais-tu ?
*
Au printemps de quoi doutais-tu ?
Mon amour que rien ne rassure
Il est victoire qui ne dure
Que le temps d'un Ave, pas plus
Ou d'un parjure
Au printemps de quoi doutais-tu ?
*
Au printemps de quoi rêves-tu ?
D'une autre fin à la romance
Au bout du temps qui se balance
Un chant à peine interrompu
D'autres s'élancent
Au printemps de quoi rêves-tu ?
*
D'un printemps ininterrompu


 
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LA PETITE JUIVE
 
Dans ce monde borné de quel entre-deux-guerres
Où ceux qui font les lois les troussaient par derrière
Nous n'avions que cinq ans, du pain sec au dessert
Pour cinq lettres de trop ou un pet de travers
On nous disait "Tu vois, c'est la croix que Grand-Père
A gagné au Chemin des Dames" et nos grands frères
Abandonnant le bleu pour un kaki douteux
Cocufiaient Madelon dans les bras de Marlène
Une fois l'an, nous allions voir entre père et mère
La victoire en chantant nous ouvrir la barrière
Et nous nous en allions en suçant des bonbons
Jouer du revolver à deux sous le bouchon
*****
Et je me souviens, la petite juive
Elle me disait "Viens !"
Elle était jolie
On faisait des bêtises
Ou on ne faisait rien
Elle s'appelait Lise
Et je m'en souviens

*****
Dans ce monde truqué de quelle drôle de guerre
Tout ceux qui font le front le bradaient à l'arrière
Nous n'avions que dix ans et dans nos gibecières
Une Histoire de France qui tombait en poussière
On nous a fait courir, traverser des rivières
Sur des ponts d'Avignon qui dansaient à l'envers
Ça tirait par devant, ça poussait par derrière
Les plus pressés n'étaient pas les moins militaires
On nous a fait chanter pour un ordre nouveau
D'étranges Marseillaises de petite vertu
Qui usaient de la France comme d'un rince-cul
Et s'envoyaient en l'air aux portes des ghettos
*****
Et je me souviens, la petite juive
On lui a dit "Viens !"
Elle était jolie
Elle a fait sa valise
Un baiser de la main
Elle s'appelait Lise
Il n'en reste rien

*****
Dans ce monde mort-né d'avant quelle autre guerre
Où le Japon blessé lèche encore son cancer
Dans ce monde septique où ceux qui ont la foi
Ne savent plus si Dieu est devant ou derrière
Dans ce monde d'argent où la banque surnage
Comme un poisson ventru qui attend le naufrage
Nous n'avons que trente ans, sainte horreur de la guerre
Et pourtant nous n'avons pas cessé de la faire
On nous a fait marner de djebels en rizières
De Charybde en Scylla, de cuvettes en civières
Comme si nous n'avions pas autre chose à faire
Qu'à montrer nos fesses aux quatre coins de la Terre
*****
Et je me souviens la petite Juive
Elle me disait "Viens !"
Elle était jolie
On faisait des bêtises
Ou on ne faisait rien
Elle s'appelait Lise
Et je m'en souviens


 
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UN AIR de LIBERTE
 
Les guerres du mensonge les guerres coloniales
C’est vous et vos pareils qui en êtes tuteurs
Quand vous les approuviez à longueur de journal
Votre plume signait trente années de malheur
********
La terre n’aime pas le sang ni les ordures
Agrippa d’Aubigné le disait en son temps
Votre cause déjà sentait la pourriture
Et c’est ce fumet-là que vous trouvez plaisant
********
Ah monsieur d’Ormesson
Vous osez déclarer
Qu’un air de liberté
Flottait sur Saïgon
Avant que cette ville s’appelle Ville Ho-Chi-Minh

********
Allongés sur les rails nous arrêtions les trains
Pour vous et vos pareils nous étions la vermine
Sur qui vos policiers pouvaient taper sans frein
Mais les rues résonnaient de paix en Indochine
********
Nous disions que la guerre était perdue d’avance
Et cent mille Français allaient mourir en vain
Contre un peuple luttant pour son indépendance
Oui vous avez un peu de ce sang sur les mains
********
Ah monsieur d’Ormesson
Vous osez déclarer
Qu’un air de liberté
Flottait sur Saïgon
Avant que cette ville s’appelle Ville Ho-Chi-Minh

********
Après trente ans de feu de souffrance et de larmes
Des millions d’hectares de terre défoliés
Un génocide vain perpétré au Viêt-Nam
Quand le canon se tait vous vous continuez
********
Mais regardez-vous donc un matin dans la glace
Patron du Figaro songez à Beaumarchais
Il saute de sa tombe en faisant la grimace
Les maîtres ont encore une âme de valet


 
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